THIERRY GAHINET - LA VIE EN CHANSONS

mercredi 23 mai 2007

RIFIFI SUR LES TOITS


Titre de bande dessinée pour cet hommage au vent et à la pluie qui viennent faire la java en leur terre de Bretagne. Il se déchainent ici comme deux larrons en foire, saccageant nos fleurs au cimetière, bousculant les réverbères. Comment ne pas partir avec eux faire la fête ?
C'est sans doute un des plus longs textes que j'ai commis. J'ai essayé d'y mettre des images, des connivences, des complaisances et de l'humour en clins d'oeil. J'ai pensé à Brassens en écrivant ces paroles, lui l'habitué de Pontrieux et le ciseleur du verbe. Du moins dans sa conception, j'évoque "l'orage" ou la "supplique pour être enterré sur la plage de Sète". Ces longs textes sans refrains, bien balancés par la musique et la rythmique ou chaque strophe amène la suivante avec un brin de surprise.

Et puis, il faut dire que comme grand nombre de bretons, je me sens si bien en ces jours dépareillés, pillés, bousculés par les éléments. J'aime aussi les prémices de la tempête lorsque le ciel annonce déjà le grand rodéo du vent et la pluie.
C'est Thierry Louboutin qui a concocté l'habillage musical, ponctué par le solo de la guitare électrique et c'est Michelle Padellec qui me donnera la réplique en un duo tout aussi savoureux.

Ces deux là font la pair ces deux là font la foire
Un faux air de vipère pour des chansons à boire
Ces deux là se consolent sur le zinc des trottoirs
Toujours entre deux flaques à défaut de miroir
Par les champs par les landes on les voit s’enrouler
Tout autour des talus comme des contrebandiers
Faut les suivre à la trace pour un jour les coincer
Flagrant délit d’outrages et tapage avéré
Ils en font du raffut rififi sur les toits
Raffolent des rafales et fantasment tout bas
Toujours au raccourci ils arrivent tout droit
Ils sont déjà ici lorsque vous les croyez là
Pour les pister encore de menez en ria
Il nous faut roucouler comme dans un opéra
Le vent chante très haut un faux air de castra
Quand la pluie tambourine ses caprices de diva

CD "Brise larmes"
(Photo de tempête : Mona Ar beg)

LE PROF CHANTE AU BAHUT







Pour clore la semaine de la poésie, au CDI, Thierry Gahinet nous offre un mini concert des chansons de son dernier CD :"De rive en rêve".
Thierry a bien voulu accoster qualques instants sur le quai du Likès et entrainer avec lui plus d'une trentaine de personnes pour un voyage poétique en chansons.
Au CDI, les livres sur les étagères sortent de leur silence et n'en croient pas leurs pages, les mots se mettent à chanter et les lettres à danser.
Les premières notes glissent des cordes de la guitare, la voix souffle comme une risée, puis devient tempête. Nous voilà tous embarqués dans un voyage, de "Tlemsen à Blida", via "Kemper" et la Bretagne, ou dans la mémoire d'un père qui a navigué autour du monde avant de poser sac à terre sur le "Dernier quai". Moments intimistes et parfois violence contenue.
Les regards de nos marins d'occasion scrutent l'horizon, découvrent de nouvelles impressions à chaque chanson et de "rive en rêve" sont peu à peu comme ensorcelés par ce "maître-chanteur" qui donne envie de chanter et de rêver.
Maître et chanteur. Quand il ne joue pas avec les mots, il enseigne la comptabilité au lycée professionnel. Ses élèves étaient là pour écouter une autre musique que la gestion d'entreprise. Bilan largement positif, Monsieur Gahinet
Entre deux chansons, Thierry présente son parcours. Les premiers disque vinyle avec un groupe de copains, puis une longue traversée du désert, faute d'inspiration. Depuis 3 ans, les mots se mettent à nouveau à jouer sur les cordes et il termine son dernier CD "De rive en rêve", ce qui nous a valu d'avoir la primeur des quelques chansons, comme "Kemper" ou "Dernier quai".
Mais la fin du voyage approche ; la dernière chanson "Winwalloe" évoque ce voilier magique qui nous a embarqués au fil des mots vers "un instant velours"
Paul Couillandeau
(article paru dans le journal "Le Likès" de juin 2007 - photos de Paul Couillandeau)

mardi 22 mai 2007

PROFESSEUR ET CHANTEUR

Je n'ai jamais fait de la chanson mon métier. Professeur de gestion à vingt ans, j'ai sévi en lycée professionnel, métier que j'aime malgré ses difficultés. C'est pour cette raison que l'idée des "Artistes travailleurs de Bretagne" m'a séduit. La création ne doit surtout pas rester confinée dans les mains des seuls professionnels. Je revendique le droit de créer, de m'exprimer devant un public, même si je me dois d'être solidaire avec les artistes professionnels dans leur démarche.
L'art de la classe rejoint assurément celui de la scène. Nous avons les mêmes exigences. Devant un parterre parfois difficile, il nous faut composer, convaincre, être attentif au moindre détail, de sa tenue aux petits effets scéniques qui font la différence. Le professeur fait son théâtre et se doit à son auditoire. La moindre baisse de régime se ressent sur l'attention des élèves. Il en est de même pour le spectacle vivant. J'ai ressenti les mêmes sensations dans un cabaret où les gens ne viennent pas spécialment pour t'écouter pousser la goualante que dans une classe en début d'année scolaire.
Je n'ai pas encore écrit de chansons sur le milieu de l'enseignement. Mais cela va venir. Quelques idées me taraudent que j'aimerais bien concrétiser : une chanson sur la salle des profs, sur le conseil de classe. Je vais commencer à prendre quelques notes.
(Photo : Gahinet et sa classe de BEP Commerce en 1979, le troisième en haut a gauche n'est autre que Serge Le Dizet, ancien joueur et entraineur des canaris nantais)

SALLE DES PROFESSEURS

Après 35 années de fréquentation assidue de la salle des professeurs de mon lycée, j'ai cru bon dresser des portraits saisis sur le vif. N'y voyez aucune ressemblance avec des collègues : Tous les personnages sont sortis tout droit de mon imagination.
Il est vrai que quelques petites pointes acerbes viennent pimenter le texte : le prof fonctio qui court après les échelons et le prof en phase qui se gargarise de vocabulaire pédagogique parfaitement incompréhensible. L'évocation de cette salle des profs évacue les élèves car j'ai voulu croquer uniquement les professeurs.



Madame Sanchez
S’en revient gaiement du trapèze
Quelle était belle la corrida
Sur un poème de Néruda
Monsieur Lamothe
Rêve encore à son asymptote
Et à cette belle inconnue
D’une équation irrésolue
Madame Tardi
Serre contre son sein ses copies
Se dit avec philosophie
Que son week -end est en sursit
Mister Bolzer
Rumine sa rage en anglais
Son numéro si bien règlé
N’a pas fait l’carton espèré

R.E.F.R.A.I.N

Il est dix heures
C’est le coup d’feu de la récré
Rien ne va plus en salle des profs
Dans la coulisse du lycée
CD "Brise larmes"
(Photo de ma salle des professeurs)

lundi 21 mai 2007

LA CHAUVE SOURIS QUAND ELLE SOURIT

C'est le genre de chanson qui commence comme cela par une association de mots qui sonnent bien ensemble : "La chauve souris quand elle sourit, même les chauves s'émerveillent". Et la chanson se bâtit autout du refrain qui revient comme une leçon bien apprise, comme un précepte dicté par le bon sens. Et il faut ensuite construire une histoire sous forme de conseils soufflés aux amoureux de la pipistrelle. J'ai pris un certain plaisir à ènoncer ces quelques évidences. Le texte est découpé en petits vers, ce qui donne à l'ensemble une allure de jeu de cartes finement serrés.
J'ai confié ce texte à Jackie Roumagnac pour tisser la dessus une musique à la hauteur de la situation grotesque et surréaliste. Elle me dit alors "mais tu nous a fait une petite chanson coquine". Mais bon dieu c'est bien sûr, elle a assimilé ma pipistrelle à une charmante jeune fille qui se promène la nuit dans des lieux glauques. Je ne fais que donner des conseils au "prédateur" qui part le soir à la recherche d'une rencontre avec cette drôle de "chauve souris". Je vous laisse donc imaginer ce que vous voulez en espérant que l'humour soit au rendez-vous.
Première leçon
Premier conseil
Pour approcher
La demoiselle
Sortez coiffé
Sortez couvert
Sortez le soir
A découvert
Traînez aussi
Dans les lieux glauques
Les lieux interdits
équivoques
Laissez vous bien
Encanaillé
Par la p’tite reine
Des nuits d’été
R.E.F.R.A.I.N
La chauve souris quand elle sourit
Même les chauves s’émerveillent
Apprivoiser la pipistrelle
C’est souvent l’œuvre d’une vie
CD « Les trois amis »
(Photo : Une pipistrelle)

SUR LE PORT DE SAINT GUE

Un jour de février 2007 ... la tempête fait rage sur le pays. A Saint Guénolé, il neige des flocons d'écume sur les quais désertés. Seuls les promeneurs des villes s'aventurent jusqu'au rocher du préfet. La mer est toute blanche. Nous allons nous saoûler aux embruns qui frappent, cognent, nous empêchent de marcher. Au bout d'une demi heure, la partie est gagnée. N'en déplaise à Devos, la mer est démontée. Il ne nous reste plus qu'à gagner l'un des bistrots ouverts. N'en déplaise à Gainsbar, la chanson est bien retenue dans mes filets.
Thierry louboutin a composé une musique bien cadrée pour recevoir les trois longs couplets de cette mélopée si tourmentée. Nous allons donc commencer à une seule guitare pour planter le décor. La basse et l'électrique viendront peu à peu renforcer les impressions de tempête. Car c'est avant tout une chanson impressionniste, laissée aux soins de l'auditeur d'y mettre ses propres ressentis.
Il neige des flocons
D’écume sur le quai
La tempête fait la fête
Sur le port de Saint-Gué
Les rues sont toutes blanches
Les bistrots sont fermés
Le ciel tourne les pages
D’une bande dessinée
Cà cogne des coups de gong
Des grelots par milliers
Le rythme s’accélère
La mer est démontée
N’en déplaise à Devos
Tout est déménagé
Plus rien n’est à sa place
Sur le port de Saint-Gué
CD « Brise larmes »
(Photo : Devinez l'erreur : il s'agit du port de Douarnenez un jour de mer calme)

LE DOCKER

C'est un sujet qui a déjà été traité. L'homme ou la femme qui rêve de voyage sans jamais pouvoir réaliser le rêve. Pour ma part, j'ai voulu coller le plus possible au paradoxe en mettant en scène ce docker, en partance par les odeurs des cargos et qui ne partira pourtant jamais. Dilemne entre l'immobilité et le mouvement perpétuel, impossibilité à mettre les voiles.
J'ai placé le décor dans ces ports de commerce en me remémorant le port de Lorient, les grues, les cuves, les billes de bois sur les quais, les bistrots de l'avenue de la Perrière.
Et je revois aussi ces dockers du port de pêche, affectés au déchargement du poisson, dans les petits matins de courant d'air de la criée.

A force de zieuter les grues
Sur le terminal charbonnier
Il en a chopé la berlue
Mais ses muscles sont en acier
A force de jauger les cales
Et les containers sur le quai
Il s’est inventé des escales
Dans tous les ports du monde entier
Il aura beau rouler carosse
De tango en bossanova
Il rêve toujours des voyages
Qu’au grand jamais il ne fera

CD "Brise larmes"

(Gravure dont l'auteur m'est inconnu)


dimanche 13 mai 2007

MALINKE BAMBARA

Il arrive parfois que je commence un texte, simplement par une accroche de mots, sans savoir l'histoire qui se dessinera derrière. C'est le cas de cette dérive sentimentale en trois tableaux. J'avais au départ ce jeu de sons et de mots "j'ai craqué à Cracovie. Le "crac crac" me plaisait bien. J'ai donc poursuivi par un amour tumultueux avec une pianiste polonaise, amour romantique bien-sûr. Je suis ensuite parti vers une relation tendue, d'autorité, avec une marseillaise, l'hymne de l'état français en filigranne. Passion exigeante et suicidaire, compagne de nos campagnes qui au nom de la la liberté expédie les sans-papiers au point de non-retour. Mon vagabond sentimental, que je personnifie à la première personne, trouve alors un amour apaisé auprès d'une belle Malienne, doucement accompagné par le chant de la cora.